19.11.2018

Allocution de Mélanie Demers

Allocution de notre présidente d’honneur 2018 – la chorégraphe Mélanie Demers

Bonsoir. C’est un honneur d’être parmi vous. Nous sommes ici, ce soir, pour célébrer les Prix de la danse. Pour célébrer les primés, les premiers, les privilégiés donc. Mais j’aimerais prendre ce moment pour souligner le prix de la danse. Ce que ça coûte à tous les autres, à ceux qui ne gagnent pas. Ce que ça coûte de temps, de sang, de sueur, de labeur pour danser. Pour danser hors lumières. Quand les feux de la rampe ne sont pas on.

Danse de nuit. Quand l’affadissement du merveilleux plombe sur nous. Quand La valeur des choses. Les choses dernières sont question de souffle et de vie. Quand nos deux corps sur le comptoir sont fin de party. Quand il n’est plus question de s’envoler. Quand la cathédrale fait bang bang. Quand le show est poche. Quand ce n’est plus blouskaille olouèze. Quand le jardin des délices, c’est destroy. Quand c’est fin de série. Quand le lifeguard a fini son shift. Quand ever so slightly c’est foutrement le déluge. Quand au bout de ton effort, tu penses, avec pas d’cœur, in fact I’m gross. Que tout est hot mess autour. Que ton auto-fiction n’est pas monumental. Quand Montreal by night, n’est que néant. Quand le blues te prend so blue ! et que le souffle de l’aube n’a pas encore masqué les solitudes. Tu penses, il faudra some hope for the bastards…

Il faudra trouver quelque chose pour ne pas mourir drette-là. Et si jamais l’espoir se pointe. Que tu as encore envie de bouger. Fuck it, écoute pour voir, c’est l’aube, la discordantia n’est plus, le dortoir s’est réveillé. Nos normal desires sont devenus Cosmic Love. Savage Love. Le temps de chien bat en retraite. Tu te drapes, yellow towel, de ta plus belle anatomie. Il y a un temps pour tout. Aujourd’hui c’est rock steady. Joe et Stella valsent variations mécaniques. Tu pleures des larmes manufacturées, right ? Mais le ghost en toi est hyperterrestre. Quand retentit Cantique no3, tu sais qu’avec un peu de tendresse bordel de merde, ton corps caverneux n’a plus peur. Tu piss in the pool. C’est chaud. The complex simplicity of love te réconforte. Enfin, tu n’es plus animal triste. Et tu fermes les yeux, exaucé.

À ceux qui dansent quand personne ne regarde. À ceux qui dansent seuls dans leur salon. À ceux qui dansent contre vents et marées. À bout de bras. À bout de souffle. Souvent dans des conditions de logement délabré. À ceux et celles qui danse à 10, ce soir c’est aussi à vous que je pense.